Calendrier coquin : et si vous mettiez du piment sous le sapin ?

La rédaction 10 novembre 2025

Chaque année, les calendriers de l’Avent se multiplient en France, comme si la société cherchait à ritualiser l’attente par des micro-récompenses quotidiennes. Des thés, du vin, des cosmétiques, du matériel de bricolage… tout semble désormais pouvoir tenir dans vingt-quatre petites cases en carton. Mais dans ce paysage saturé, il est un objet qui détonne : celui proposé par Dorcel, qui habille le mois de décembre de sextoys, d’accessoires BDSM et de lingerie plutôt que de pralines suisses.

Ce coffret n’est pas seulement un produit de l’industrie du plaisir : c’est un symptôme. Le signe qu’un imaginaire longtemps confiné aux tiroirs de chevet s’affiche désormais sur les tables de salon, au même titre que les chocolats pour enfants.

L’Avent est devenu adulte,ou du moins une part de lui.

Quand le rituel religieux se transforme en rituel érotique

Le calendrier de l’Avent est historiquement lié à la préparation spirituelle de Noël.
Le détourner vers une montée en puissance sexuelle n’est pas juste un coup marketing : c’est une réécriture culturelle.

On ne “se prépare” plus à la naissance du Christ, mais à vingt-quatre jours de stimulation. On remplace la prière par la vibration, la patience enfantine par un jeu progressif entre partenaires, et la transmission d’une tradition familiale par une exploration intime.

Ce glissement dit beaucoup de la société : une fête qui, depuis vingt ans, s’est largement désacralisée et s’est transformée en rituel de consommation, finit logiquement par intégrer la sexualité comme terrain légitime.

Noël devient un moment où adultes et couples cherchent à réenchanter le quotidien autant qu’à décorer leur sapin.

Un objet qui traduit l’esthétisation du sexe

Le coffret Dorcel n’est pas un sachet opaque rempli de gadgets roses bonbon.
C’est un objet designé, pensé, marketé comme un produit de luxe.
Packaging noir, dorures, numérotation limitée : le code visuel se rapproche plus d’un coffret de champagne que d’un sextoy de grande surface.

Cette esthétisation du sexe n’est pas anodine.
Elle indique que la sexualité n’est plus perçue comme une activité honteuse ou marginale, mais comme une pratique lifestyle.
Le sextoy n’est pas seulement un outil, c’est un accessoire. Une pièce d’identité culturelle. Un marqueur.

On ne cache plus son plaisir : on le collectionne.

Un calendrier pour qui ?

Contrairement à l’image qu’on pourrait s’en faire, ces calendriers ne s’adressent pas uniquement aux couples “libérés” ou aux fans d’accessoires coquins.
Ils séduisent surtout :

• Les couples installés

Ceux qui cherchent à créer une parenthèse ludique dans un quotidien pris entre travail, famille et écrans.
Ouvrir une case est une excuse pour recréer du rituel dans la vie sexuelle — ce qui manque cruellement dans les relations longues.

• Les femmes solo

Curieuses, autonomes, habituées à consommer du plaisir sans partenaire.
Pour elles, le calendrier de l’Avent est une façon de transformer décembre en défi personnel, presque comme un calendrier fitness… mais version masturbation.

• Les néophytes

Ceux qui n’auraient jamais acheté un plug ou un harnais de leur vie, mais qui osent davantage quand l’objet est noyé dans un ensemble pré-emballé, présenté comme un “parcours de découverte”.

Le coffret agit comme un déculpabilisateur prêt-à-l’emploi.

La limite de l’objet : une sexualité clef en main

Cependant, il y a un biais :
en transformant la sexualité en un kit découverte, en vingt-quatre étapes clés en main, on fabrique une forme de pédagogie du plaisir très scénarisée, presque industrielle.

Le risque, c’est de produire une sexualité formatée, guidée par le packaging plutôt que par le désir authentique.

Ouvrir une case n’est pas toujours synonyme d’envie.
Et suivre le calendrier peut parfois ressembler davantage à un défi TikTok qu’à une exploration intime.

Mais l’industrie du sexe est à l’image de toutes les industries culturelles : elle propose, elle invite, elle suggère. C’est aux utilisateurs d’y projeter leur propre liberté.

Vers un Noël résolument adulte ?

Qu’un calendrier de l’Avent puisse contenir aussi bien un stimulateur clitoridien qu’un bandeau en satin raconte quelque chose de très simple :
l’enfance n’est plus la seule dépositaire de la magie de décembre.

Les adultes veulent, eux aussi, des rituels, des surprises, de la montée en tension.
Pas pour ouvrir des cadeaux sous le sapin, mais pour réouvrir un espace de désir.

À propos de l’auteur

La rédaction


Réagir à cet article

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

interstron.ru