Les anciens business érotiques

Flore Cherry 10 avril 2021

Peep-shows, théâtres érotiques, cinémas pornographiques… que sont devenus tous ces commerces d’antan qui participaient à l’activité culturelle coquine française ? Par quoi ont-ils été remplacés ? Retour dans la sexualité avant le XXème siècle et l’arrivée d’internet…

Lorsque l’on se représente l’évolution des commerces de l’érotisme sur ces dernières décennies, difficile de ne pas penser au web et à la prolifération du porno accessible à tous, gratuitement. Cette technologie a-t-elle modifié à jamais certains savoirs, certains arts ? Indiscutablement, à commencer par les lieux de divertissement…

Le spectacle vivant a-t-il perdu face au porno en ligne ?

Pour Arthur Vernon, gérant de Sweet Paradise, une scène érotique parisienne : « Les théâtre érotiques se sont montés en même temps que les cinémas porno, fin des années 70. Il y avait alors une vraie curiosité à découvrir des gens faire l’amour, à s’émouvoir devant des corps nus pour la première fois. On sortait au cinéma ou au théâtre. Aujourd’hui, avec le porno en ligne, cette curiosité n’est plus au rendez-vous et il y a un confort à rester chez soi. »

Certains théâtres érotiques, comme le célèbre « Théâtre des Deux Boules », connaissaient pourtant une réelle notoriété de par la qualité de leur show et leur originalité. Ces théâtres continuent encoreà perdurer dans d’autres pays d’Europe, comme aux Pays-Bas.

Pour Guillaume le Disez, auteur et éditeur de livres sur l’âge d’or du X (pulsestore.net), ce « spectacle vivant » n’a pas totalement disparu ! « Il y a toute une partie qui s’est déplacée ailleurs, dans les clubs de province, qui invitent des hardeuses célèbres pour faire de l’animation en boîte de nuit. Le spectacle érotique se consomme en « live », dans un contexte festif. Et pour les filles qui font des carrières dans le X, cela peut représenter un complément de revenu considérable ! »

Les salons de l’érotisme continuent par ailleurs de déplacer les foules dans différentes villes de France ! Et s’il y a bien évidemment des stands qui vendent lingerie et sextoys, les shows et performances érotiques sur scène attirent nombreux amateurs.

Quant aux fameux peep-shows qui s’annonçaient par néons fluos sur les murs de sex-shops, Yves Le Monnier, rédacteur de l’ancien Guide Musardine du Paris Sexy reconnait que leur survie est limitée « Le peep-show, ça a presque totalement disparu et, quelque part, on ne l’a pas trop vu disparaitre ! Cette transformation accompagne le déclin des sex-shops un peu crapoteux qui laissent petit à petit place aux lovestores, plus tendance. »

Qui a tué le cinéma porno ?

En 2019, Maurice Laroche éteignait pour la dernière fois la toile du Beverley, l’ultime cinéma pornographique parisien qui survivait encore, d’années en années.
Encore un mort dû à l’arrivée d’une autre toile, numérique, cette fois-ci ? Pas seulement. Le cinéma porno s’est éteint non seulement à cause de l’avènement de la VHS, puis d’internet, mais aussi par des mesures gouvernementales très restrictives qui sont scrupuleusement appliquées dès les années 80.
Selon Guillaume le disez « La loi X qui bénéficiait d’une certaine tolérance avant les années 80, s’applique de façon très stricte en 1981, en faisant de la répression, en envoyant des réalisateurs et producteurs au poste. Cela coïncide avec l’arrivée du support physique qui permet de regarder le porno à la maison et qui de toute façon allait affaiblir le secteur mais les lois rendaient déjà la vie dure au business du cinéma porno. »

Ce que regrette le plus ce passionné d’anciens films X ? Toute la culture autour du titrage des films de cul. « Quand je bossais à Canal +, je réfléchissais aux titres du pay-per-view (télévision à la carte). C’était très important, car le seul outil de promotion, c’était le titre. Je faisais des séances de retitrage pour qu’ils donnent envie. Aujourd’hui, sur Pornhub, il n’y a pas cette envie de jouer sur les mots, de teaser… ça s’est totalement perdu ! »

Les clubs échangistes, c’est plus comme avant ?

S’il y a bien un secteur qui perdure encore, à travers les décennies, ce sont les clubs libertins. Mais ils connaissent à leur tour une lente modification, ainsi qu’une déperdition, qui colle avec une société plus libre dans ses mœurs et avec l’explosion des sites de rencontres.
Pour Yves Le Monnier, l’évolution s’est faite en cloche, avec un point culminant lorsque les clubs ont été médiatisés : « Je pense qu’au maximum, dans les belles années du Paris sexy, de 2004 à 2005, il y avait une cinquantaine de clubs libertins. Ardisson en faisait la promo à la télé, et, la rumeur, c’était se taper un people en allant aux Chandelles. Aujourd’hui, beaucoup d’adresses ont fermé, et d’autres essaient tant bien que mal d’attirer une population plus jeune. Beaucoup de boîtes étaient restées dans l’univers des bordels ou dans « Eyes Wide Shut », ça s’est vraiment ringardisé. Même le mot « échangiste » a pris un coup de vieux et n’est plus autant utilisé. »
Il faut dire que les soirées privées s’organisent de plus en plus facilement avec les moyens de communication actuels et la location rapide d’appartements pour une seule nuitée. Des soirées où « le casting » est également plus simple à maîtriser qu’en club, permettant de pratiquer un libertinage « à la carte », plus proches des envies des participants !

« Send me a nude », tout le monde peut faire des photos érotiques

 Fini, également, le temps où les grands médias s’intéressaient aux femmes du monde du porno au même titre que des auteurs populaires ou des stars de la chanson. Guillaume le Disez se souvient : « Dans les années 90, les stars du X allaient chez Dechavanne, chez Ardisson, elles dépassaient le cadre qui leur avait toujours été alloué. Il y avait un effet de légitimisation de leur travail par des boites de production, par les magazines ou les émissions de télévision. »

Aujourd’hui, bien souvent, les camgirls et les actrices X font elles-mêmes leur promotion en développant leur propre communauté. C’est le phénomène de la désintermédiation, que l’on connait dans beaucoup d’autres économies, une facilité de mise en relation entre le client et la personne qui propose ses services grâce aux nouvelles technologies.

Le domaine de « l’économie du nude » aurait d’ailleurs connu un bon en 2020, avec le développement de plateformes comme Onlyfans, des outils mis à disposition d’influenceurs qui peuvent alors proposer des photos, vidéos et services exclusifs moyennant un abonnement.

Un nouveau métier qui explose alors, à mi-chemin entre celui de la pin-up, du minitel rose et du modèle de charme.

Quand on vous disait que rien ne se perd, tout se transforme…

A LIRE AUSSI : 

Le porno sonore est-il le futur du porno ? 

Vidéos porno : notre top 5 spécial reconfinement

Le porno avant Internet : 5 trucs qu’on a totalement oublié ! 

À propos de l’auteur
Flore Cherry

Flore Cherry

Journaliste, blogueuse et organisatrice d'événements dans le milieu de l'érotisme, je suis une jeune fille cul-rieuse qui parle de sexe sans complexe (et avec une pincée d'humour, pour que ça glisse mieux !)

Réagir à cet article

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

interstron.ru