L’évolution du comportement sexuel des jeunes
16 août 2016Les comportements sexuels évoluent-ils au fil des générations ? C’est ce que semblent indiquer de nombreux sondages sur les nouvelles pratiques de nos compatriotes. Et tout particulièrement la jeune génération, qui a intégré les évolutions technologiques dans ses relations affectives et sexuelles. Trois jeunes femmes témoignent.

Indéniablement, la jeune génération révolutionne chaque jour un peu plus le sexe dans ses approches amoureuses. Tout comme les années post-1968 avaient été celle d’une certaine révolution sexuelle, le XXle siècle fait la part belle aux expériences en tous genres, à une sexualité de plus en plus commentée sur les réseaux et qui, bien souvent, se conjugue au virtuel pour les accros du 2.0.
*[enquête dirigée par Nathalie Bajos (Inserm) et Michel Bozon (lned démo-graphie), et commandée par l’ANRS (Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales) pour aider à guider les politiques de prévention en matière de sexualité (IST, sida)]
On constate également que ces dames sont de plus en plus nombreuses à assouvir leurs fantasmes, assumant pleinement leurs désirs. Une Française sur trois a déjà fait l’amour en étant dominée par son partenaire, et une femme sur quatre a testé la fessée érotique : c’est trois fois plus qu’en 1985 ! Dans la mouvance des jeux de domination/soumission, 16 % des femmes ont déjà fait l’amour les yeux bandés et 24 % aimeraient bien essayer. Si l’on y ajoute les 25 % qui seraient prêtes à tester si leur partenaire le leur demandait, cela signifie que deux femmes sur trois se montrent ouvertes à l’expérience. Une attirance encore plus forte chez les moins de 35 ans : 23 % l’ont déjà fait, 41 % aimeraient le faire, et 21 % seraient d’accord pour essayer.
Profitant d’Internet et de ses sites en ligne qui leur évitent de devoir pousser le rideau rouge d’un sex-shop, les femmes utilisent de plus en plus de sextoys, largement démocratisés : cela concerne 45 % des femmes de moins de 35 ans et 35 % au-delà. Dans les deux cas, plus de la moitié d’entre elles utilisaient leur sextoy avec leur partenaire, et une sur trois exclusivement en solo. Mais, ce qui a le plus modifié le comportement de la jeune génération, c’est bien sûr Internet et surtout les réseaux comme Facebook ou Twitter, générateurs de postures (tel comportement est branché ou pas) et de jugements, voire de dénigrements et de harcèlements entre groupes de jeunes. Et de ce point de vue, on peut parler de régression si l’on compare avec la génération parentale baba bucolique des années 1970/1990, alors nettement plus permissive qu’elle ne l’est aujourd’hui, surtout dans les banlieues socialement défavorisées.
Afin d’en savoir un peu plus sur la façon dont la jeune génération aborde le sexe, nous avons recueilli les témoignages de trois femmes aux profils différents, mais dont les propos reflètent la réalité d’une sexualité en pleine mutation. Paroles de femmes.
À voir aussi >> Les jeunes adeptes du libertinage racontent leurs expériences
Sara, 22 ans, étudiante, célibataire, Argenteuil
Un petit tour sur Internet, un beau mec, une rencontre, un plan cul sans lendemain, ça me suffit. J’ai dû coucher avec une dizaine d’hommes. L’un deux m’a avoué que j’étais la première femme avec qui il le faisait. Un truc de ouf ! À l’époque, j’avais 19 ans, lui 21. Il se masturbait sur des vidéos X du net depuis l’âge de 14 ans, et ça lui allait bien comme ça. Au lit, ça n’avait pas accroché entre nous, surtout quand il avait voulu m’éjaculer sur le visage. Je l’ai traité de tous les noms. Lui voyait ça tout le temps sur ses vidéos de cul, il pensait qu’il fallait le faire comme ça pour être un homme. À la base, c’était un mec bien, honnête, assez ouvert, mais les discussions avec ses potes l’avaient formaté comme une machine. J’ai arrêté au bout de deux semaines. Il n’a pas compris pourquoi et m’a traitée de salope. Pour l’instant, je ne cherche pas le grand amour. Le plan maman au foyer avec six gamins, non merci !
Lydie, 25 ans, agent d’assurance, en couple, Toulon
Je voulais depuis longtemps un « chez moi » avec mon copain. Nous sommes ensemble depuis quatre ans et, pour l’instant, tout fonctionne bien. Je n’ai eu que deux partenaires avant lui. Le sexe se passe bien, même si, bien sûr, ce n’est plus comme au début. Lui ne cesse de vouloir pimenter notre sexualité avec des jouets. J’ai déjà accepté pour lui faire plaisir, mais ce n’est pas trop mon truc. Dernièrement, il m’a proposé d’aller dans un club libertin. Visiblement, l’idée de me voir faire l’amour devant d’autres personnes l’excite. Pour l’instant, je ne me sens pas prête. Je ne sais pas, je suis pudique quand même. le suis partie assez tôt de chez moi, j’avais envie de m’assumer en tant que femme. J’ai donc choisi un travail et un appartement avec Thomas pour me sentir libre. Bien sûr, la plupart de mes copines me disent que j’ai précipité les choses, que j’aurais dû m’amuser plus, mais je n’y pense pas. Je n’ai pas franchement essayé grand-chose sur le plan « sex ».
En ce moment, Thomas me tanne grave avec la sodomie. Me prendre par les fesses est devenu son obsession [Rire]. J’attends un peu ! Je dirai oui pour lui faire plaisir, mais bon… Déjà, parfois, j’accepte que l’on fasse l’amour en regardant un film porno. Moi, je préfère les scènes entre filles. Je ne le dis pas trop à mon mec, sinon il va me demander un plan à trois avec une autre nana, je le connais ! Peut-être plus tard… Pourquoi pas ! Dans l’absolu, ce serait un fantasme. Les filles me tentent bien… Mais je préférerais commencer toute seule. Thomas aime aussi les tenues coquines. L’autre fois, il a commandé une panoplie d’infirmière. On s’est fait un petit scénario et c’était sympa. Il me dit souvent que je suis trop coincée, alors j’essaye de me montrer parfois plus coquine, mais le sexe n’est pas ma priorité. Je ne sais pas, être chez moi avec mon homme devant un bon film, en se faisant des baisers tendres, c’est bien aussi non ? La seule galère : il passe trop de temps sur les réseaux sociaux. Du coup, on ne se parle pas tant que ça.
À voir aussi >> Partage éphémère, la liberté par la contrainte
Aline, 28 ans, graphiste, célibataire, Paris
(Photo à la une et autres photos : Getty Images)