Salo V : Le salon du dessin érotique débarque à Paris !
24 mai 2017La Galerie épisodique accueille 93 artistes venus présenter leurs œuvres « très » sensuelles. Cette cinquième édition du salon du dessin érotique, interdit au moins de 16 ans, s’appelle Salo, une référence en russe au « gras du cochon ». Il faut aussi y voir une référence au décapant « Salo ou les 120 journées de Sodome », l’œuvre phare de Pier Paolo Pasolini. Rencontre avec Laurent Quenehen, commissaire de l’exposition.
• Union : Pensez-vous que le sexe et l’érotisme dans l’art représentent encore des sujets tabous ?
J’ai l’impression que le sexe et l’érotisme sont devenus des sujets parfois houleux. Faire un salon du dessin érotique dans les années 70 était banal, sans grand intérêt. Dans ces années là, il y avait des cinémas pornos qui avaient pignon sur rue avec leurs titres alléchants et tout le monde avait dans sa chambre une photo de David Hamilton. Les oeuvres n’étaient pas réservées à un public averti, une exposition comme « Présumés Innocents » n’aurait pas eu les soucis qu’elle a eus. Il faut bien constater qu’aujourd’hui, si l’on montre une photo de femme avec les seins nus sur Facebook, on est puni. Le salon du dessin érotique est réservé au plus de 16 ans, ce qui est ridicule puisque les plus jeunes ont accès à des images pornographiques sur le net. Mais je n’ai pas le choix car je n’aurais pas les moyens financiers d’affronter une association religieuse.
• Union : Est-ce que l’expression érotique peut-être un acte politique ? Militant ?
Oui, absolument. Comme l’indique le titre du film de Judith Cahen : « la révolution sexuelle n’a pas eu lieu ». L’expression érotique est un acte militant, politique. Que sait-on de la sexualité des français ? Des jeunes, des vieux, des enfants, quelle enquête ? Lors des dernières élections, quel candidat a évoqué les problèmes de certains prêtres dans l’église catholique ? Et les jeunes filles de 15 ans d’origines étrangères envoyées au pays pour être mariées à des inconnus ? Le problème des prostituées qui doivent se cacher et risquent leur vie en passant par Internet ? Maintenant que le mariage gay est autorisé, on pense que la sexualité n’est plus un souci. C’est faux, l’expression de la sexualité, de l’érotisme ne concerne ni le mariage ni même l’amour. Salo vient du titre du film de Pasolini qui était communiste, catholique et homosexuel affirmé avec de multiples partenaires. Peut-être que l’expression érotique est un communisme des corps, des formes, c’est donc parfaitement politique et militant.
• Union : Quels messages les artistes cherchent-ils à véhiculer ? Où puisent-ils leur inspiration ?
Chaque artiste du salon a son expression érotique personnelle qui est peut-être un érotisme rêvé, non accompli. Il y a une majorité d’artistes femmes dans ce salon et de multiples formes d’expressions érotiques pour chacune. Je dirais que les femmes artistes sont plus libérées que les hommes, mille et une choses ou formes peuvent êtres sujettes à sensualité, érotisme, c’est abstrait quelques fois. Un objet qui se colle à un autre est déjà érotique. C’est vraiment un goût affirmé pour la sensualité, tous les sens sont en éveil : le regard, le toucher, l’ouïe. Ces artistes puisent leurs inspirations dans leur imaginaire, leur fantasmatique et la poésie. Les artistes hommes également, mais autrement. Les hommes artistes sont parfois moins libérés des représentations, ils ont besoin d’un support clair en terme d’érotisme. Les féministes ont beaucoup fait pour la libération de la femme, de son imaginaire. La libération de l’homme, on l’attend.
• Union : Quels sont les artistes et les œuvres phares de ce salon ? Quelles sont celles qui vous ont vraiment touché personnellement ?
Il est difficile de préférer certaines œuvres à d’autres, certains artistes à d’autres. J’ai volontairement non sélectionné des artistes qui étaient dans les précédents Salo alors qu’ils sont très bons et qu’ils ont absolument leur place dans ce Salo là. Il faut laisser une chance à ceux qui viennent de nul part, n’ont pas fait les bonnes écoles ou n’ont pas les contacts pour percer dans l’art. Il y a par exemple deux artistes qui vont exposer pour la première fois de leur vie ou quasiment : Sophia Proença qui est de Bordeaux et fait des dessins un peu sismographiques. Et Sara Jeanmougin qui est iranienne, elle fait de la photo. Dans sa photographie, elle est coincée dans une cuisine, comme un objet utilitaire, elle vient d’un pays où c’est signifiant de la place de la femme. Egalement une jeune japonaise qui est encore étudiante aux beaux-arts de Paris, Kanaria. Ces jeunes artistes vont exposer en compagnie d’Alberto Sorbelli, Vincent Corpet, Eric Pougeau, Frédéric Léglise, des princes de l’art contemporain et je suis content de ça.
Le salon se tiendra du 2 au 5 juin 2017, au 1 rue des Nanettes dans le 11ème arrondissement de Paris.
Horaires : Vendredi-Samedi-Dimanche : 11h-21h
Lundi : 11h-18h
Pour tout renseignement complémentaire, rendez-vous .