Juliusz Fromm, l’homme qui a révolutionné le préservatif

Aujourd’hui, le préservatif moderne allie finesse, confort et efficacité. Mais derrière ce petit accessoire indispensable se cache l’histoire fascinante d’un Polonais visionnaire. Zoom sur Juliusz Fromm, chimiste de génie, entrepreneur audacieux et… roi incontesté du latex aminci.

Des débuts modestes

Né en 1883 en Pologne dans une famille juive très modeste, Juliusz Fromm ne semblait pas prédestiné à transformer nos vies intimes. Mais c’était sans compter sur son génie… et un mariage un peu précipité. Après avoir déménagé à Berlin à l’âge de 10 ans, il se plonge dans des études de chimie.

À cette époque, le préservatif était déjà en circulation, mais sous une forme peu glamour : un boyau d’animal traité, peu pratique et loin d’être confortable. Avec l’avènement du caoutchouc dans les années 1880, des versions un peu plus modernes et réutilisables voient le jour.

Le modèle de l’époque, inventé par Goodyear en Angleterre, mesure deux millimètres d’épaisseur et est doté d’une soudure grossière sur le côté. Loin d’être une référence en matière de discrétion, le préservatif Goodyear est lavable, réutilisable et garanti cinq ans !

Mais Fromm, après avoir goûté aux joies d’une grossesse non désirée avec sa fiancée, l’obligeant à un mariage forcé, décide qu’il est temps de moderniser tout ça. Et voulant éviter ce genre de situation à d’autres hommes, il se met en tête de réinventer le préservatif.

Le triomphe des « Fromm »

Sa brillante idée ? Transformer le latex en version liquide, le mélanger à de l’essence et tremper ce mélange dans des moules en verre de forme phallique. Résultat, un préservatif beaucoup plus fin, facile à enrouler et jetable après usage. Plus question de boyaux d’animaux ou d’épaisseurs inutiles : Fromm donne enfin au monde une contraception fiable, discrète et surtout, confortable.

Pour commercialiser son invention révolutionnaire, Fromm fonde une entreprise à son nom. Et son slogan est imparable : « La concurrence crève. » Subtil et efficace. En seulement dix ans, il construit trois usines et devient, en 1914, le fournisseur officiel de l’armée allemande. Pendant que les soldats se battent, Fromm s’assure qu’ils soient bien protégés… sur tous les fronts.

Après la guerre, son succès explose. L’homme d’affaire installe des distributeurs automatiques et vend près de 50 millions de préservatifs par an dans toute l’Europe. Sa marque devient si populaire qu’en Allemagne, on ne demande plus : « Tu as un préservatif ? » mais « Tu as un Fromm ? ».

La chute d’un empire sous les Nazis

Mais l’Histoire, avec un grand H, vient briser cet empire. En 1933, Hitler arrive au pouvoir et les nazis s’attaquent aux entreprises juives. En tant que juif, Fromm est forcé de vendre sa société pour une bouchée de pain… à la marraine d’Hermann Göring. Charmante ironie pour un homme qui a littéralement protégé l’Allemagne.

En 1939, Juliusz Fromm fuit en Angleterre, échappant de peu à une fin tragique. Ses trois frères et sœurs, eux, ne survivront pas aux camps de concentration. Exilé, ruiné et brisé, Fromm meurt d’une crise cardiaque en 1945, quatre jours seulement après la capitulation de l’Allemagne. L’homme qui avait révolutionné la contraception succombe au poids de l’Histoire, laissant derrière lui un héritage monumental.

Après la guerre, son fils Herbert rachète la marque familiale à prix d’or. Aujourd’hui, les préservatifs Fromm existent encore, vendus sous le nom « Billy Boy » par la société MAPA en Allemagne. Une jolie revanche sur l’histoire.

Juliusz Fromm n’a pas seulement révolutionné la contraception, il a également contribué à des vies amoureuses plus sûres et plus confortables. Grâce à lui, des millions de vies ont été protégées, des grossesses non désirées évitées, et l’amour a pu s’exprimer en toute liberté. Et même si son histoire a pris un tournant tragique, son invention a survécu, offrant à chacun la possibilité de vivre une sexualité épanouie et responsable.

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