Le ghosting est-il une pratique nocive ?

Gwendoline Casamata 2 octobre 2024

Si votre crush ne vous répond plus, il pratique peut-être le ghosting, cette disparition momentanée et des plus surprenante.

Déverrouiller son téléphone toutes les dix secondes avec l’espoir d’y apercevoir enfin une notification, c’est le désir vain de bon nombre de personnes ghostées. Mais qu’est ce que le ghosting exactement et comment s’en prémunir ? On vous explique.

Le ghosting, c’est le fait d’interrompre une relation du jour au lendemain sans explication. C’est partir sans crier gare et disparaître comme un fantôme. Le ghosteur choisit ainsi l’absence et le ghosté la subit jusqu’à parfois en perdre la raison. Et quand une personne décide d’en ghoster une autre, elle n’imagine pas l’impact d’une telle décision. Le silence devient insupportable, assourdissant. L’autre tente alors de le combler en cherchant une explication à ce départ précipité. Un cran au dessus de la rupture par SMS, le ghosting est un véritable tour de force qui tire sa violence de l’incompréhension et l’indifférence. Courant dans les mœurs amoureuses des générations Y et Z, le phénomène trouve sa définition dans le Collins English Dictionary dès 2015 et une page wikipédia lui est même dédiée. Plus touchés que les hommes, les femmes en sont les premières victimes. Un sondage réalisé par le magazine Elle montre que les femmes sont d’avantages victime de ghosting (24%) que les hommes (16%).

Le ghosting, un phénomène de société de moins en moins répandu

Cette pratique tend à se démocratiser tant elle est répandue dans notre société. Cet essor est en partie dû au développement des réseaux sociaux et des applications de rencontres. Les plateformes comme Tinder, Bumble ou Instagram ont multiplié les rencontres et accéléré les interactions. L’application Tinder revendique même des pics à 4 milliards de « swipes » par jour. D’écran interposé à interposé, la communication n’est évidemment pas la même que dans la vraie vie. Une certaine distance caractérise les interactions entre les utilisateurs et dans ce contexte, le ghosting est une méthode facile pour mettre fin à une relation sans perdre de temps et sans avoir à faire face à la personne. D’après certaines études, l’appartenance à une génération peut influencer la propension d’une personne à devenir un ghosteur. Une étude de Bumble a révélé que le pourcentage de millenials ghosteurs était plus élevé que celui de la génération Z qui considère comme incorrect le fait de ghoster. Pour nombre de jeunes, les messages pavés d’explications ne sont donc plus d’actualité pour justifier la décision de rompre. Mais comme le montre l’étude, cette tendance ne s’applique pas aux plus jeunes.

Le Thriving Center of Psychology a mené une étude auprès de membres de la génération Z et Y pour comprendre les raisons qui poussent à ghoster. A la suite de cette étude, il apparaît qu’une personne sur trois n’a pas d’image négative du ghosting et que 65% des membres de l’étude avouent l’avoir eux-même pratiqué. La disparition de ce partenaire qui part acheter des cigarettes et ne revient jamais est devenue une souffrance auquel on s’expose quand on entame une relation. Jugés sans grande incidence pour certains, ils sont pourtant 30% à déclarer en avoir marre des rencontres notamment pour ce point. L’étude a également permis d’identifier les motivations qui poussent à l’utilisation toujours plus croissante de cette méthode controversée. Il apparait que le désintérêt en est la première cause. 64% des personnes ghostent parce qu’elles ne sont plus intéressées par la poursuite de la relation. Eviter la confrontation est la seconde motivation. 56% des personnes interrogées justifie l’emploi du ghosting pour éviter la confrontation et échapper à une conversation difficile. Pression, manque de connexion ou problème de santé mentale sont autant d’explications pour justifier l’emploi de cette pratique radicale.

Une pratique qui n’est pas sans conséquences

De nombreux professionnels du secteur de la santé mentale s’accordent sur le fait que son usage est douloureux, dommageable et destructeur. Entre sentiment de rejet, souffrance émotionnelle et remise en question, la violence psychologique que représente ce comportement n’est pas sans conséquences. Dans le média britannique The Independant, la thérapeute psycho-sexuelle Sylvia Anim décrit les effets secondaires du ghosting sur la santé mentale de certains de ses patients. « La nature soudaine et inexpliquée de ce ghosting peut les amener à s’interroger sur leur valeur et sur ce qu’ils ont pu faire de mal, ce qui peut être particulièrement préjudiciable à leur santé mentale » explique la thérapeute. Les victimes de ghosting témoignent d’une perte d’estime de soi, d’anxiété et dans certains cas plus alarmants, manifestent des symptôme de dépression.

Plus la relation est avancée, plus la douleur d’être ghosté est conséquente. Cette pratique, largement démocratisée sur les applications de rencontres, survient généralement lors des premiers rendez-vous, lorsque la relation n’est pas clairement engagée. Mais lorsque cette rupture radicale intervient plus tard dans la relation notamment après un rapport sexuel, les effets psychologiques sont d’autant plus néfastes. Sylvia Anim explique que « quand quelqu’un est ghosté après une relation aussi intime, cela peut amplifier les sentiments de trahison, de honte et de douleur émotionnelle« . Ces conséquences peuvent impacter les victimes de ghosting sur la durée et influencer les relations suivantes. A long terme, certaines victimes manifestent des problèmes de confiance en soi, en l’autre et ressentent une peur de l’abandon.

Dans les colonne du Huffington Post Uk, la psychologue Emma Kenny, à contrepied de bon nombre de ses confrères, trouve du positif à cette méthode. Elle conseille les célibataires de voir les avantages d’être ghosté. « Considérez le ghosting comme une opportunité de réévaluer vos valeurs personnelles, de vous rappeler votre estime de soi et d’être reconnaissant de ne pas perdre de temps ou d’investir émotionnellement dans quelqu’un avec qui cela n’aurait pas fonctionné de toute façon. » encourage t-elle. En considérant cette rupture nette comme un gain de temps et en ne s’attardant pas sur les raisons motivant cette décision, les victimes peuvent ainsi chercher un partenaire qui leur correspond.

En somme, le ghosting soulève des questions sur la manière d’interagir et plus largement la représentation de la relation à l’ère du digitale. Dans un monde où tout va toujours plus vite, l’absence d’interaction directe et la rapidité avec laquelle une personne change de partenaire, modifient la conception du respect et de la communication dans les échanges. Même si le ghosting semble être un gain de temps, il est crucial de considérer la disparition silencieuse comme dernier recours et non comme la solution à privilégier. Pour lutter contre le phénomène certaines applications de rencontres montent au créneau. La plateforme Hinge a récemment annoncé le lancement d’une nouvelle fonctionnalité baptisée « your turn limits ». Cet outil empêche les utilisateurs de mettre un terme à une conversation sans donner d’explications à leur interlocuteur.

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