Le Tako Tsubo, la maladie du cœur brisé

Gwendoline Casamata 15 octobre 2024

Connaissez-vous le Tako-Tsubo ? C’est le syndrome du cœur brisé par le chagrin ou, à l’inverse, le syndrome du cœur joyeux déchainé par un bonheur extrême. Une réaction émotionnelle intense submerge le cœur au point de donner l’impression qu’il pourrait exploser. Identifié pour la première fois en 1991, le Tako Tsubo ou syndrome du cœur brisé, est une altération cardiaque engendrée par une source de stress importante.

Le Tako Tsubo, quand le stress attaque le cœur des femmes

Trouble connu depuis plusieurs années au Japon, ce syndrome tire son nom d’un pot japonais dont la forme s’apparente à une amphore. Le Tsubo, un pot à large fond circulaire et au bord étroit, sert de piège pour attraper les poulpes (Tako) qui s’y réfugient. Lorsqu’une personne est atteinte de la maladie du cœur brisé, le cœur, sous l’effet d’un stress aigu ou d’une émotion forte se ballonne et ne remplit plus sa fonction de pompe. L’organe prend alors une forme semblable au Tsubo caractéristique de cette insuffisance cardiaque.

Une étude Suisse publiée dans l’European Heart en 2019 établit un lien entre le cerveau et cette affliction. En comparant l’activité cérébrale de personnes souffrant d’un syndrome de Tako-Tsubo à celles de personnes en bonne santé, les chercheurs parviennent à une conclusion : les patients atteints du syndrome disposent d’une connectivité cérébrale différente. Le cerveau ne traitant pas les émotions de la même manière, ils seraient plus sensibles aux émotions fortes. Les femmes, plus sensibles au stress ont plus de chance de développer la maladie du Tako Tsubo. Les neurones impliqués dans la création d’état de stress ont des récepteurs aux œstrogènes, la principale hormone sexuelle féminine.

Les femmes de plus de 50 ans sont les principales sujettes de ce trouble et disposent d’artères particulièrement sensibles aux effets de l’hormone de stress. Après la ménopause, elles ne sont plus protégées par leurs œstrogènes naturels et y sont d’autant plus exposées. Les hommes semblent mieux protégés du stress. Seuls 10% d’entre eux sont touchés, notamment à la suite d’un effort intense. En raison du facteur stress, les patients ayant des pathologies psychiatriques ou neurologiques sont considérés à risque de développer cette maladie.

Une affliction soudaine

La maladie se manifeste par des symptômes similaires à ceux de l’infarctus. Les patients touchés ont l’impression de faire une véritable crise cardiaque : douleur pression dans la poitrine, essoufflement, transpiration, palpitation et perte de conscience. Mais à la différence de l’infarctus, le Tako Tsubo n’est pas lié à l’obstruction des artères coronaires. L’organe cardiaque est visiblement en souffrance mais les artères se révèlent intactes.

La docteur Claire Mounier Véhier, cardiologue au CHU de Lille explique que le syndrome intervient à la suite d’un événement impactant : décès, rupture, accident, mariage, naissance. Tout choc émotionnel ou physique, bon ou mauvais, qui entraine forcément un stress intense, peut conduire à un Tako Tsubo davantage encore, lorsque cette situation spécifique est associée à une fatigue intense. Une étude de 2015 menée par des chercheurs suisses et publiée dans la revue New England Journal of Medecine conclue qu’un choc émotionnel ou physique couplée à une importante fatigue morale est déclencheur du Tako-tsubo.

Face à l’évènement de trop et le stress qu’il engendre, le cœur se met en état de sidération. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Le stress aigu déclenche une libération massive d’hormones de stress, les catécholamines. Et sous l’effet, une partie du cœur (la pointe et les parois latérales) ne peut plus se contracter.

Le cœur brisé, un symptôme qui peut être grave

Les premiers symptômes liés à un stress émotionnels aigu ne doivent surtout pas être sous-estimés. Le syndrome de Tako Tsubo nécessite une hospitalisation en urgence pour éviter tout risque de complication grave et permettre une prise en charge en unités de soins intensifs cardiologiques. Comme pour l’infarctus du myocarde, chaque minute compte. « Ce phénomène est potentiellement facteur de troubles aigus du rythme ventriculaire gauche, qui peuvent causer la mort subite, mais aussi la formation de caillots sanguins dans le cœur avec un risque d’embolies artérielles. »  explique la cardiologue Claire Mounier Véhier.

Cette forme d’insuffisance cardiaque reste le plus souvent réversible quand la prise en charge cardiologique est précoce. Le cœur reprend sa forme et ses fonctions initiales au bout de quelques jours ou quelques semaines. « On y parvient avec le traitement médical de l’insuffisance cardiaque, une rééducation cardio-vasculaire et un suivi cardiologique régulier » explique le docteur Claire Mounier Véhier.

Il est primordial d’adopter une bonne hygiène de vie, connaître l’origine de son stress et comment le gérer pour éviter la récidive qui touche un patient sur 10.

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