Violences conjugales : des mesures de l’État peu convaincantes ?
26 novembre 2019219 000 femmes sont victimes de violences conjugales (physiques et/ou sexuelles). Et une femme meurt, tous les deux jours, battue par son conjoint ou son ex-conjoint. Elles sont désormais 138 à s’être éteintes depuis le début de l’année 2019, un bilan macabre qui ne cesse de s’aggraver de jours en jours.
Ce 23 novembre 2019, une houle pourpre a foulé les rues de Paris pour dénoncer les violences sexistes et sexuelles à l’encontre des femmes. Un ras-le-bol général suinte au sein de la population féminine, qui attend enfin des mesures concrètes de la part du gouvernement. Depuis le lancement du Grenelle, Edouard Philippe, premier ministre, annonçait enfin les propositions issues de ces 3 mois de réflexion depuis septembre.
Une réelle prise de conscience
Dans les principaux points énoncés, le gouvernement envisage d’urgence la création de 1000 nouvelles places d’hébergements et de logements d’urgence pour les femmes victimes. Ainsi que « la généralisation du dépôt de plainte à l’hôpital, ou encore l’identification de « procureurs référents spécialisés » dans tous les tribunaux« , détaille .
note que « dans plus de 30% des cas de féminicides conjugaux recensés en 2018 et 2019 en France, les victimes ont été abattues (par une arme)« . À la première plainte, toutes armes à feu seront donc retirés aux suspectés de violences conjugales, s’ils en détiennent. Et début 2020, le port d’un bracelet électronique pourra être imposé afin de maintenir à distance le conjoint ou ex-conjoint violent. Ou suite à une condamnation pour violence conjugale.
Le gouvernement prévoit aussi plusieurs changements du côté de police nationale. D’ici 2021, près de 80 nouveaux postes d’intervenants sociaux vont être ajoutés dans les commissariats et les brigades. « Ils constituent des maillons essentiels d’accueil, de premières prises en charge de femmes qui déposent plainte » soulignait Edouard Philippe. D’autant plus que les forces de l’ordre pourront plus facilement discerner une victime en danger. Et ce, à l’aide d’une grille d’évaluation, qui comporte 23 questions : notamment « votre partenaire ou ancien partenaire a-t-il déjà menacé de vous tuer ou de tuer quelqu’un d’autre ? (enfant) », « a-t-il précisé de quelle manière il projetait de le faire ?« .
La levée du secret médical fait encore débat
« Lorsque cela peut sauver des vies, [nous devons] offrir la possibilité aux médecins de déroger au secret médical », évoquait Edouard Philippe. Car certains « cas d’urgences absolues » peuvent se présenter, « où il existe un risque sérieux de renouvellement de violences« .
Pourtant, : selon lui, c’est « une fausse bonne mesure ». Il s’est expliqué dans une interview de Franceinfo : « Quand on connaît les femmes victimes de violences, quand on les accompagne au quotidien, on ne doit pas prendre les décisions à leur place, car si vous prenez les décisions à leur place elles vont fuir, elle vont dire « jamais de la vie ». » Gilles estime qu’une mesure d’accompagnement pourrait davantage aider ces femmes victimes. Mais « pour cela, il faut former les professionnels. »
De nombreux spécialistes de la santé sont en négociation avec le gouvernement, afin de « parvenir à un dispositif protecteur des victimes et sécurisant pour les professionnels. »
Les associations déplorent le budget instauré
En réalité, c’est le seul point qui ne subira pas une grande modification. Comme le souligne : « Il est quasiment identique à celui débloqué en 2019« , soit environ 360 millions d’euros. Des fonds qui ne sont pas suffisants en vu des mesures à mettre en place. Bien que le premier ministre insiste sur le fait que « les financements sont là », « ils sont massifs ».
« On est sur le terrain et on observe qu’il y a de réels besoins. Or, ceux-ci vont forcément augmenter au regard des mesures annoncées » affirme Marie Cervetti. : « On continue à moyens constants, mais une politique non financée est une politique pas appliquée ».
Le sentiment que le gouvernement se repose sur les associations se ressent beaucoup. Le renforcement du 3919, la ligne d’écoute dédiée aux victimes de violences conjugales, en est un exemple. Gérée par la Fédération nationale solidarité femmes, elle fonctionnera vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Mais rien ne spécifie qu’une augmentation des subventions pour cette association opérera.
« l’État doit prendre ses responsabilités ». « Ce sont déjà les assos qui font le boulot, le minimum c’est de doubler leurs subventions. Elles sont étouffées : on ne parle pas que du 3919. Toutes les associations d’aide aux victimes crèvent parce qu’elles font le travail que devrait faire l’État, avec toujours moins de moyens ».
(Photo à la une : le gouvernement dévoile ses mesures à la fin du grenelle, le lundi 25 novembre à Matignon)
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