La femme frigide n’existe pas ! (sauf dans votre tête…)
12 décembre 2019La femme frigide n’existerait pas. Il s’agirait surtout d’une expression galvaudée, concernant les troubles sexuels, et serait aussi une insulte sexiste.
« Frigide », qu’entend-on par là ? Souvent, « froideur sexuelle ». Pour un peu plus de précision, la psychiatre et sexologue, « dans le DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux américain), il correspond à une absence de désir et de plaisir pendant une période d’au moins six mois« . Insultant et aux connotations très péjoratives, le mot frigide est quelque peu « populaire » dans le vocabulaire grivois, en vu de railler un manque de libido et/ou une incapacité à jouir. Ou tout simplement, la non-volonté de succomber aux plaisirs que procure le sexe, peu importe la raison qui se cache derrière. Et contre tout attente, la frigidité se réserverait – surtout – à la gent féminine.
La frigidité, miroir d’une société où prime la « réussite » sexuelle
« Quand un homme dit à une femme qu’elle est frigide, c’est qu’elle le renvoie à une limite de puissance de leur capacité virile« , évoque Anne-Marie. Une partie des hommes hétérosexuels se confortent dans l’injonction qu’ils doivent faire jouir une femme. Et si dans la majorité, voire dans tous les cas, selon les pensées des hommes, toutes ses partenaires ont joui, ils imaginent que le « problème » vient de cette femme. Dans d’autres cas, le « partenaire est pris d’un élan égoïste qui l’inquiète et se demande ce qu’il a mal fait« , explique Anne-Marie. Il se sent alors déstabilisé dans son « rôle masculin » au sein de sa sexualité.
Mais tout cela résulte d’une théorie où la réussite d’un rapport sexuel se signe d’un aller direct au septième ciel. La sexualité représentée dans la cinématographie en est d’ailleurs un parfait exemple : une étude britannique avait notamment rapporté que 39% des femmes atteindraient le nirvana, en opposition à 24% dans la vraie vie. Cette pression sexuelle peut se répercuter sur notre plaisir, en plus de la pornographie ou de l’influence des écrans.
La frigidité, un terme en voie de disparition ?
Désormais, la frigidité serait « en réalité peu utilisé, tant il est imprécis« , atteste la sexologue Ghislaine Paris. Fut un temps, ce terme rangeait un peu tous les dysfonctionnements sexuels féminin dans le même sac. Notamment, les troubles de l’orgasme, les troubles de l’intérêt sexuel et de l’excitation, ainsi que les douleurs génito-pelviennes.
En fin de compte, l’évolution de la médecine permet de dépoussiérer des considérations sexistes cachées derrière certaines maladies (ce qui a notamment été le cas avec la nymphomanie). D’autant plus que grâce à elle, les spécialistes prendrait mieux en compte certains troubles comme la peur liée à la pénétration (vaginisme). Sans compter l’apparition de nouveaux termes médicaux, qui permettent d’être davantage précis, là où la frigidité était un mot « fourre-tout ».
Armelle Chance, sexologue et thérapeute, reste ferme : « La frigidité n’existe pas« . Il faut surtout y voir une difficulté à mettre en phase le corps et l’esprit. « Soit parce qu’elle est en froid avec son partenaire ou qu’elle n’a plus les mêmes sentiments, ou encore que son esprit est accaparé par autre chose« , argue Anne-Marie Lazartigues. Et pour Armelle Chance, « le mariage des deux s’apprend » et par exemple, grâce au tantrisme. Pratiquer le sexe tantrique peut apporter beaucoup de bénéfices dans la sexualité personnelle ou même entre deux partenaires.
En parallèle, la société changerait au fur et à mesure sa vision sur la sexualité. Peut-être qu’un jour, ne plus avoir de désir sexuel pourrait ne plus être perçu comme un dysfonctionnement.
Un jugement hâtif dont souffrent ceux qui vivent très bien leur asexualité, par exemple.
(Photo à la une : Getty Images)
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